Mémoire du Zouk

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Origine du zouk

Extrait du Magazine de Dominique  

Pierre-Edouard Décimus

Au même titre que le créole qui est un mélange de différentes langues, le Zouk est une musique dont les influences multiples sont puisées dans la diversité des musiques caribéennes.
Depuis sa création en 1974, il reste la musique la plus populaire des Antilles. Il représente, aujourd’hui, le ciment de l’identité antillaise.

De plus, il caractérise l’émancipation de tout un peuple, qui a su réinventer sa propre musique.

Mais d’où vient le mot « zouk » ?

Il existe plusieurs versions contradictoires à propos de l’origine du mot « zouk » ainsi que sur sa véritable date de création.
Dans le dictionnaire Le Petit Robert, il est écrit que la dénomination zouk « musique de danse très rythmée, originaire des petites Antilles » n’est apparue que dans les années 1980.

Cependant, le célèbre percussionniste martiniquais Henri Guedon, indique que durant les années 1960, le mot « zouk » faisait référence à des lieux de danse réservés aux plus pauvres.

Certains parlent d’une origine haïtienne du mot : bien avant les grands morceaux de zouk, dans un des albums du groupe haïtien Skasha, il y avait un titre nommé « souke ». D’autres racontent que le mot zouk vient d’une contraction du mot « mazouke » qui fait référence à la danse mazurka.

Si la provenance étymologique du mot « zouk » demeure encore aujourd’hui chargée de mystères, ce n’est pas le cas en ce qui concerne son origine musicale. La majorité des gens situent de la même manière sa paternité.
A l’origine de la musique zouk : Kassav’ (La cassave, galette de farine de manioc, à l’origine du nom du célèbre groupe).
Parler de la naissance du zouk revient à parler de la création du groupe Kassav’. Pour la majorité des Antillais, c’est ce groupe musical qui a créé les bases fondamentales et donné sa couleur musicale au Zouk.

L’histoire du zouk commence avec la rencontre en 1979, de deux personnages emblématiques de la musique antillaise. Pierre Édouard Décimus, musicien dans un orchestre de danse, « les vikings de la Guadeloupe », et Freddy Marshall, découvreur de talents, se rencontrent dans le but de donner un nouveau souffle à la musique locale. A l’époque, les rythmes les plus écoutés sont le Gwo Ka, La Biguine, le Compas et la musique des « vidés », aux rythmes soutenus et entraînants, jouée pendant le carnaval aux Antilles.

Une idée de génie

C’est en écoutant cette musique populaire du carnaval que Pierre Édouard Décimus eut l’idée de l’adapter aux récentes techniques musicales. A l’aide de son magnétophone, il se mit à enregistrer les sons joués dans les « vidés » qu’il allait ensuite retravailler dans son studio situé à Grand camp, afin de créer de nouveaux sons s’inspirant de l’ambiance musicale du carnaval.C’est à ce moment qu’il rencontre Freddy Marshall, qui apportera sa touche musicale à ce projet.

 

Naissance du groupe Kassav’

Les deux hommes rencontrent, par la suite, Jacob Desvarieux, guitariste de studio confirmé. Peu de temps après, George Décimus bassiste, qui est le frère de Pierre Édouard Décimus les rejoint. C’est ainsi que naît le groupe Kassav’.

L’année suivante, ce groupe ainsi constitué, sort un album appelé love and ka danse. Un nouveau genre musical est né : le zouk. Sa base harmonique est fondée sur deux ou trois accords en apparence simples, mais révèle sa richesse dans une superposition rythmique (percussions, riff de guitare, section de cuivres et cœurs.) Très vite, l’apparition de nouveaux sons, surtout au niveau des basses, des claviers et cuivres donne à cette musique un air de modernité et surtout de fête, qui en fait une musique vivante et dansante.
Dans les années 1980, le groupe connaît un succès fulgurant. Bientôt, Il se retrouve au complet avec l’arrivée de Jocelyne Béroard, Jean Philippe Marthély, Patrick St Eloi et Jean Claude Naimro au clavier. Le groupe ainsi complété, joue une musique marquée par la diversité de ses membres. Cette collaboration entre ces artistes débouche, alors sur un style nourri d’influences multiples, ouvert et constitutif d’une démarche musicale à part entière, en rupture avec les musiques antillaises de l’époque. C’est ce qui fera son succès à l’intérieur et à l’extérieur de sa région d’origine.
D’autres musiciens vont alors suivre l’exemple de Kassav’ et faire vivre cette musique aux quatre coins du globe.

Le zouk en plein essor

Cette musique antillaise connaît alors son apogée dans les années 80-90 : en 1989, Kassav’ se voit remettre un disque de Platine pour avoir vendu un million de disques à travers le monde. Le zouk est internationalement connu ! D’autres titres marqueront les esprits des Français comme « fruits de la passion » de Francky Vincent, ou encore le célèbre « mal’don » de Zouk machine, qui restera quatorze semaines consécutives numéro un au Top 50 français.
Pourtant, le zouk en plein essor va encore subir des transformations ce qui va lui permettre d’élargir encore son public.
Les différentes déclinaisons du zouk Le zouk est un courant musical qui génère, aujourd’hui encore, de nouvelles tendances auxquelles naturellement on donne des noms nouveaux, mais qui sont toutes nées du Zouk.

Le zouk love

Du zouk originel, on est très vite passé dans le zouk love. Le changement de tempo est la caractéristique de ce nouveau zouk. Au fil des années, le tempo s’est ralenti. Aujourd’hui, on assiste à un véritable engouement pour le zouk love. C’est un zouk particulier, essentiellement dansé par les jeunes. Il est l’équivalent du slow français avec un côté chaloupé et langoureux. Cette danse novatrice, pleine de sensualité contraste avec des textes pauvres qui traitent inlassablement de thèmes similaires : le plus souvent l’amour, et les rapports entre les hommes et les femmes.

Le zouk Rn’B

Influencée par les Etats-Unis, les artistes des Antilles françaises s’essayent depuis longtemps au style musical américain. Il était donc naturel de décliner le zouk sous le mode Rn’B. Jean Michel Rotin est l’un des premiers à avoir lancé cette nouvelle tendance musicale avec son tube « lè ou love ». Il se démarque également à sa façon de danser le break sur sa propre musique issue du courant zouk. Dès lors, de nombreux artistes se sont intéressés à cette nouvelle variation du zouk, profitant de la tendance RN’B et Rap des années 90.
Depuis, le style s’est codifié. En studio, les boîtes à rythmes remplacent les batteurs, les textes chantés en créole sont ponctués de quelques expressions anglaise, et on trouve de nombreux passages « rappés ». Tout cela se construit sans jamais perdre la rythmique originelle du zouk, qu’on n’oublierait presque, face à la profusion d’éléments surajoutés.

Le ragga-zouk

Le raggamuffin fait partie de ces nouveaux courants qui ont immédiatement séduit les jeunes. Aujourd’hui, la mode est au mélange du raggamuffin et du zouk. Les artistes Don Miguel et Daddy Harry ont été les premiers à lancer ce mouvement aux Antilles.

Une certaine nostalgie du zouk

Malgré toutes les déclinaisons qui touchent le zouk aujourd’hui, « le zouk des premiers temps » passionne toujours les générations qui se succèdent. Aux Antilles, il ne se passe pas une semaine sans que des soirées soient organisées pour des passionnés de « zouk rétro » qui n’est toujours pas démodé et qui continue à véhiculer toute la chaleur des Antilles.

Le zouk superstar

En l’espace d’une vingtaine d’années, le zouk s’est imposé comme une véritable référence musicale aux Antilles et dans le monde. Issu d’un métissage de différents styles musicaux, il a été adapté sous toutes les formes et repris dans différents pays. La Réunion, le Gabon, l’Amérique du sud et bien d’autres ont adopté le zouk et l’ont revisité. Sa renommée est telle que pour faire la fête aujourd’hui, aux Antilles, on dit : « on va zouker ».

 

EXTRAIT du Livre de Pierre-Edouard Décimus

 Une Zouk Story

Le courant musical que Kassav’ crée se fait connaître en tant que « zouk» par le truchement du public: une musique festive qui convie à la danse.

Très vite, ce mot est associé au style et à la musique de Kassav’, puis le groupe l’adopte et l’impose mondialement, lui donnant ses lettres de noblesse.

La signification usuelle de « zouk » m’était connue, car dès 1967, je séjournais régulièrement en Martinique avec Les Vikings de la Guadeloupe. Or, d’anciens ouvriers de l’usine Larenty résidant sur l’« habitation » avaient eu l’occasion de m’expliquer cette « coutume », qui remonterait à la période d’après-guerre.

En ce temps-là, après avoir reçu leur paie, les hommes se retrouvaient chaque quinzaine à deux pas de la sucrerie, dans une sorte d’échoppe avec un appentis en tôle ondulée, des planches et des branches de cocotier.

Ils étaient attablés par petits groupes, certains pour une partie de dominos ou de sèbi (jeu de dés), d’autres pour discuter de choses diverses autour d’une bouteille et de quelques victuailles, tandis que chanteurs et musiciens occasionnels égayaient l’atmosphère.

« Zouk » désignait alors une ambiance de tripot et de beuverie, plutôt réservée aux hommes. À partir de 1960, les Martiniquais âgés de 18 à 35 ans commencèrent à nommer « zouk » les soirées dansantes populaires organisées entre amis (ceux qui approchaient 35-40 ans fréquentaient les bals du samedi, plus communs, et les « grands bals » de prestige tels que le bal du Club colonial de Fort-de-France ou le bal de la Solidarité scolaire de Pointe-a-Pitre, qui avaient lieu une fois l’an).

En 1984, sachant que « zouk » signifiait « surboum », Patrick Saint-Eloi composa la chanson « Zouké ». Lorsqu’il s’exclamait « Ça, c’est le zouk ! » il invitait l’assistance à participer au concert de Kassav’ sur un mode « zouk », comme à une soirée dédiée à la fête entre amis.

À partir de 1985, le public prend l’initiative d’associer « zouk» à Kassav®

– dans une acception dérivée du terme d’origine – ainsi qu’aux musiques provenant de la « galaxie Kassav’», qui occupent alors plus de 90% des playlists les plus jouées dans les soirées « zouk », les discothèques et les fêtes familiales, jusqu’en 1994.

Mais l’appellation recèle d’autres surprises, qui (ré)sonnent comme elle, mais n’ont pas le même sens – encore une histoire de consonances qui renvoie à l’origine de Kassav’ :

s’il désigne une galette caribéenne, « Kassav’ » est depuis 1985 un groupe musical.

«Zouc», «zouk», «zouké», «zouk-la», « Le zouk », « Zouki ». Aucune confusion possible entre ces termes, qu’ils soient apparentés ou non. Cette diversité est l’essence même de notre belle langue créole pleine de subtilités et de vitalité. J’ajouterai cette petite anecdote : un jeudi soir, à la télévision, on rediffusa la pièce Jeux de massacre d’Eugène Ionesco, captée en 1970 au théâtre Montparnasse ;

 

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